Basel Aml Index 2024: que retenir du 13eme indice mondial des risques de BC-FT?
Le Basel Institute on Governance – une organisation internationale indépendante – vient de publier la mise à jour de son indice mondial des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme. Cet «AML Index 2024» classe les pays selon leur exposition aux risques de BC-FT, et s’accompagne d’un rapport d’analyse assez complet. L’indice, construit sur des données variées, permet de mettre en lumière quelques grandes tendances mondiales, et peut être une source d’information pertinente, complémentaire des publications du GAFI.
Un indice complet sur les enjeux de sécurité financière
L’AML Index 2024 fournit une évaluation détaillée des risques de BC-FT dans 203 pays et juridictions (164 dans sa version publique), à partir de plusieurs types d’indicateurs et données publiques, issues notamment des rapports d’évaluation du GAFI, de Transparency International (qui publie annuellement son indice mondial de la perception de la corruption) de la banque mondiale ou encore de Reporters sans frontières. Une fois consolidées, ces données permettent une évaluation au regard de cinq sous-catégories :
La qualité du cadre règlementaire portant sur la LCB-FT
Les mesures permettant de lutter contre la corruption
La transparence financière
La transparence de l’action publique
Les risques juridiques et politiques
Ces évaluations, combinées à une règle de pondération, attribuent un score global qui permet d’apprécier sur une échelle de 0 à 10 le niveau d’exposition aux risques de BC-FT – 10 représentant la plus forte exposition.
Pour cette treizième édition, quelques changements méthodologiques sont à relever, notamment l’inclusion de davantage de données portant sur la fraude et la cybercriminalité.
Myanmar en haut de la liste, les pays d’Europe bien notés
Côté classement, on retrouve sans surprise des scores de risque relativement élevés pour les pays listés par le GAFI : Myanmar, ajouté il y a deux ans sur la liste noire, obtient le score le plus élevé (8.17) – l’Iran et la Corée du Nord n’étant pas évalués en raison de l’absence de certaines données – devant Haïti (7.92) et la République Démocratique du Congo (7.73). Les pays jugés à haut risque sont majoritairement les pays du continent Africain et de l’Asie du Sud-Est. On relèvera notamment les niveaux de risque élevés de l’Algérie (6.92), récemment listée par le GAFI, des Emirats Arabes Unis (6.18) – sujet sensible discuté depuis plusieurs années – ou encore de Malte (5.18) et de la Hongrie (5.06), pays de l’Union Européenne disposant des moins bonnes notes.
A l’autre bout du classement, c’est le micro-Etat de Saint-Marin qui dispose de la meilleure note (2.96), suivi de l’Islande (3.00) et de la Finlande (3.07). La France est plutôt bien classée (3.86), ce qui est cohérent avec les conclusions du dernier rapport d’évaluation du GAFI. On sera davantage critique avec l’Italie (4.80) et l’Allemagne (4.63).
La fraude, un facteur de risque pour la sécurité financière
Dans une certaine mesure, l’évolution des scores de risque, de même que les changements méthodologiques, illustrent quelques tendances mondiales : le rapport accompagnant la publication de l’indice s’arrête en particulier sur la fraude, dont plusieurs indicateurs ont été intégrés aux modalités de calcul du score global. Ces nouveaux éléments ont contribué à une augmentation des niveaux de risque de certaines juridictions, notamment des pays très développés et disposant de grands centres financiers – davantage exposés aux mécanismes de fraude et de cybercriminalité.
Les pays listés par le GAFI : des situations (très) hétérogènes
Dans une dimension plus analytique, le rapport revient également sur la situation des pays présents sur la liste grise du GAFI, et rappelle à juste titre que cette liste inclut de nombreuses juridictions pour lesquelles le caractère approprié des dispositifs nationaux de BC-FT peut être très variable, et donc que tous les pays listés ne portent pas nécessairement des risques de BC-FT élevés. En conséquence, l’Institut suggère de ne pas systématiquement rprocéder à une vigilance renforcée pour les pays sur liste grise du GAFI, mais de procéder à une appréciation au cas par cas. Et en effet, les indices de risque de BC-FT des pays sur liste grise sont assez variés, allant d’un score assez faible (4.53 pour la Croatie) à un niveau significativement plus élevé (7.92 pour Haïti). A l’inverse, certains pays disposent d’un indice assez élevé, sans pour autant être listés par le GAFI.
Dans l’ensemble, cette nouvelle édition de l’AML Index fournit donc une cartographie intéressante pour mieux documenter les risques de criminalité financière associés aux pays, et il peut être pertinent qu’il soit considéré par les équipes de conformité des établissements assujettis à la règlementation LCB-FT, qui sont tenues de prendre en compte les facteurs géographiques dans leur appréciation des risques, conformément – pour la règlementation française – à l’article L.561-4-1 du code monétaire et financier.
La cartographie complète et le rapport sont disponibles depuis le site de l’Institut.
Qu’est-ce que l’institut de Bâle sur la gouvernance ?
Le Basel Institute on Governance – ou institut de Bâle sur la gouvernance – est une organisation non gouvernementale internationale consacrée à la prévention de la lutte contre la corruption et la criminalité financière. Il a été fondé en 2003, et est un institut associé de l’Université de Bâle. Outre la publication de l’AML Index, l’Institut contribue à la promotion du recouvrement des avoirs au travers de l’International Centre for Asset Recovery (ICAR).